A lire et à faire lire à nos équipes officinales
La crainte des dermocorticoïdes, de la part des patients ou de certains professionnels de santé, est bien souvent un frein à leur prescription et donc un obstacle à l’amélioration rapide de l’état cutané.
Une crainte souvent relayée concerne le caractère photosensibilisant des corticoïdes cutanés, pourtant non confirmé par les études cliniques et les monographies médicamenteuses.
S’il est avéré que telles croyances sont répandues parmi le grand public on aurait pu penser qu’il n’en allait pas de même dans les équipes officinales chargées de délivrer ces produits, notamment en période estivale.
Tel n’est semble-t-il pas le cas si l’on en croit les résultats d’une étude présentée par un groupe de pharmaciens et de pédiatres universitaires.
A Sacko et coll. ont testé sur des groupes Facebook les réactions de 126 membres d’équipes officinales (48,4 % de pharmaciens, 40,5 % de préparateurs et 10,3 % d’étudiants) face à une prescription de dermocorticoïdes pour dermatite atopique en période estivale. Parmi eux une grande majorité étaient réticents devant cette ordonnance, soit en raison d’une méfiance générale vis-à-vis de cette classe thérapeutique (12 %), soit du fait de la crainte supplémentaire d’une photosensiblisation (36 %) ; 51 % des sujets interrogés n’étaient pas particulièrement circonspects mais estimaient cependant que les dermocorticoïdes étaient photosensibilisants.
Fait essentiel, ces opinions de membres de l’équipe officinale se sont traduites par des conseils allant à l’encontre de la prescription (arrêt durant l’exposition solaire dans 28 % des cas, arrêt ou limitation du traitement en dehors de toute exposition solaire dans 43 % des cas). Les risques évoqués par les participants étaient ceux des rayons ultraviolets en général, celui de troubles de la pigmentation ou celui d’une aggravation de la dermatite atopique.
Sans déterminer la cause de ces craintes infondées, les auteurs concluent que ces croyances fausses “sont bien ancrées chez les pharmaciens” et induisent des conseils erronés aux patients.
On peut cependant moduler cette interprétation en instant sur un biais méthodologique de cette étude qui a recruté ses participants sur des groupes Facebook qui, on l’espère, ne sont pas nécessairement représentatifs de l’ensemble de la population officinale, les réseaux sociaux concentrant à l’envie les opinions négatives. Facebook est donc peut-être tout autant en cause que les potards.
Dr Nicolas Chabert
Référence: Sacko A et coll.: Dermocorticoïdes et soleil un malentendu chez les pharmaciens. Journées Dermatologiques de Paris, 3-7 décembre 2019.