Mise au point du LEEM
- 25 06 13
Le Leem dénonce catégoriquement l’orientation, le contenu et les conclusions du rapport publié hier par Michèle Rivasi, députée européenne, sur le coût du médicament en France. L’organisation professionnelle déplore que le débat sur la maîtrise des dépenses de santé soit détourné au profit d’une étude manifestement bâclée, où le vernis économique sert d’habillage à des arguments idéologiques rebattus et outranciers.
« Gabegie », « chantage », « mainmise », ces trois observateurs n’ont pas de termes assez forts pour dénoncer l’industrie du médicament. Une industrie qui fait pourtant partie des secteurs les plus surveillés, régulés et contrôlés en France et en Europe, et dont les prix sont parmi les derniers à être encore administrés par l’Etat. Une industrie dont la mission première est d’apporter du progrès thérapeutique au malade, et qui consacre, en France, 5 milliards d’euros par an à la R&D. Une industrie, enfin, qui participe très largement aux économies de santé, et qui connaît depuis deux ans une récession historique.
La dépense de médicaments de l’assurance maladie obligatoire s’élève à 22,9 milliards d’euros (et non 35,5 milliards comme indiqué par les trois observateurs). Pour le seul régime général, les remboursements de médicaments sont en décroissance de – 0,8 % en 2012, contre une croissance de + 1,9 % pour la totalité des remboursements de soins de ville.
En incluant les produits d’automédication (non pris en charge) et les médicaments hospitaliers, le marché du médicament en 2012, exprimé en prix fabricant hors taxes, s’élève à 27 milliards d’euros dont 19 milliards d’euros de médicaments remboursables en ville, en décroissance de – 3,3 %.Face à cette pseudo-étude, le Leem tient à apporter les éléments d’information suivants :
- La réalité des prix
Quatre études indépendantes ces cinq dernières années sur les niveaux de prix aboutissent au même constat : les prix industriels des médicaments en France sont dans la moyenne basse européenne. Quant aux prix publics, qui incluent le coût élevé d’un important réseau de distribution de proximité, ils se situent dans la moyenne des prix européens.
Les prix publics français sont en constante diminution, comme le souligne le rapport de la Commission des comptes de la Santé de septembre 2011 : « Les prix publics des médicaments remboursables sont en diminution continue ». Ce phénomène est imputable aux baisses de prix ciblées, au développement des grands conditionnements et à l’augmentation de la pénétration générique. Par ailleurs, la part de l’industrie pharmaceutique dans la structure de prix d’un médicament remboursable en officine est de 65,8 %, constante depuis 15 ans (65,4 % en 1997). Elle n’est donc pas, comme le prétendent les auteurs, de 72 % !
Notons que les baisses de prix des médicaments ont permis d’engendrer 925 M€ d’économies pour l’Assurance Maladie sur le seul exercice 2012.
Concernant les médicaments génériques, deux plans de baisses de prix massif sont intervenus dans le répertoire officiel en 2012 (à hauteur de 250 M€ d’économies pour la Sécurité Sociale), ramenant les prix des génériques français dans la moyenne européenne.
En prix publics, l’incitation financière pour les pharmaciens à remplacer le médicament de marque par le générique, engendre un prix public proportionnellement plus élevé en France que dans les autres pays européens : pour les génériques, la marge des pharmaciens sur le générique est en effet égale, en valeur absolue (et donc en euros) à celle du princeps.
Par ailleurs, la maîtrise médicalisée, c’est-à-dire la diminution des volumes et la généralisation de la substitution générique par les pharmaciens, entraîne, selon la Commission des Comptes de la Sécurité Sociale, plus de 300 M€ d’économies par an depuis 2009, année de mise en œuvre de la rémunération sur objectifs des médecins.
Le marché des génériques a connu un bouleversement depuis juin 2012 : la mise en place de la mesure « Tiers payant contre génériques » : on constate une augmentation sans précédents du taux de pénétration générique dans le répertoire : il était de 65,1 % du répertoire conventionnel en avril 2012, il passe à 83,2 % à fin avril 2013. Les économies engendrées par cette mesure sont massives : – 421 M€ (source GERS).
- La réalité de la consommation
Toutes les études disponibles confirment une convergence des comportements de prescription et consommation en Europe.
Pour opérer une comparaison objective des consommations moyennes respectives des différents pays européens, il convient de ne pas raisonner en nombre de boîtes mais en termes d’unités standard par habitant. En mars 2011, la CNAMTS a publié une étude relative aux niveaux de consommation dans les 7 principaux pays Européens (France, Allemagne, Italie Espagne, Royaume-Uni, Suisse, Pays-Bas). Cette analyse porte sur 8 classes de médicaments (antidiabétiques oraux, antibiotiques, anti-asthmatiques, hypocholestérolémiants, médicaments de l’hypertension artérielle, antidépresseurs, tranquillisants, inhibiteurs de la pompe à protons) qui représentent 28 % du volume global de consommation et 38% des remboursements de médicaments en France en 2009.
Il apparaît qu’en 2009 (dernière année publiée), la France se situe au 2ème rang ex-aequo avec l’Espagne, derrière le Royaume-Uni, des pays consommateurs de médicaments : 382 unités standards par an et par habitant vs 456 au Royaume-Uni
La France se caractérise par la plus faible évolution en volume des 7 pays européens observés avec une croissance annuelle moyenne de + 0,5 % seulement entre 2006 et 2009. Cette évolution est nettement plus forte dans les 6 autres pays européens : + 2,9 % par an au Royaume-Uni au minimum et jusqu’à + 4,6 % par an en Espagne.
Ces résultats confirment la très forte convergence des comportements de consommation en Europe, sous l’effet des plans de maîtrise de médicalisée et de l’application des recommandations de bonnes pratiques internationales.
Une étude de la chaire Essec-Santé de 2012 actualise ces résultats : si l’on compare la consommation en DDD (Defined Daily Dose) de 8 classes médicamenteuses, dans 7 pays, de 2000 à 2008. Les résultats montrent que :
- La France est restée en queue de peloton de la consommation d’anti-asthmatiques
- La France reste toujours en tête de la consommation d’antibiotiques mais on constate une convergence avec l’Espagne, l’Italie et la Belgique
- Pour les antidépresseurs, le niveau de consommation français stagne depuis 2004 alors que les autres pays continuent d’augmenter
- Pour les tranquillisants, la France a reculé dans le classement Européen (2ème en 2000 vs 3ème en 2008)
- Pour les antiulcéreux, La France occupait la 3ème place en 2000, elle occupe l’avant dernière place en 2008.
- La consommation européenne d’antidiabétiques a connu une croissance homogène
- La consommation d’anti lipidiques en France était la plus forte d’Europe en 2000, elle est 4ème en 2008, avec une très nette inflexion depuis 2005
- La consommation européenne d’antihypertenseurs a connu une croissance homogène
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Le Leem regrette donc qu’une fois de plus les mêmes experts autoproclamés se livrent à une critique opportuniste et sans nuance d’un secteur d’activités stratégique pour l’économie nationale.