DGS-Urgent n°2022_83 REPLY : Recrudescence d’infections invasives à streptocoque A – Protocole d’investigation des cas

REPLY au message DGS-Urgent n°2022_83 du 6 décembre 2022

Mesdames, Messieurs,

Le streptocoque du groupe A (Streptococcus pyogenes) est un pathogène strictement humain qui se transmet principalement par gouttelettes respiratoires, et parfois par contact direct avec une plaie infectée. Il est le plus souvent responsable d’infections non invasives bénignes, comme les angines érythémateuses ou érythémato-pultacées, l’impétigo ou la scarlatine. Il est important de rappeler que plus de 80 % des angines sont d’origine virale et que l’antibiothérapie (amoxicilline en 1ère intention) n’est recommandée qu’en cas de TROD angine positif.

Dans de plus rares cas, le streptocoque du groupe A (SGA) est responsable d’infections invasives (IISGA) potentiellement graves (bactériémies, infections cutanées nécrosantes, arthrites…), dont certaines peuvent se compliquer d’un syndrome de choc toxique streptococcique (SCTS), dû à la production d’une toxine. La létalité des IISGA est estimée à 20% toutes pathologies confondues (plus élevée pour les formes sévères comme les SCTS). Ces infections invasives à streptocoque du groupe A (IISGA) justifient une mise sous antibiothérapie en urgence.

Les données du réseau de laboratoires hospitaliers « EPIBAC » montrent une augmentation régulière des IISGA depuis près de 20 ans, passant de 1,2 cas/100 000 habitants en 2000 à 4,4 cas/100 000 habitants en 2019 (soit environ 2500 cas tous âges confondus. En 2020, l’incidence a diminué (2,4/100 000) et cette baisse s’est poursuivie en 2021 (1,5/100 000). Cette baisse de l’incidence des IISGA en 2020 et 2021 pourrait être mise en relation avec les mesures barrières mises en place en population générale lors de l’épidémie de COVID-19. Depuis septembre 2022, il est observé en France une augmentation des cas d’infections non invasives à Streptocoque du Groupe A comme les scarlatines mais également des infections invasives IISGA, en particulier chez les enfants.

Cette recrudescence des cas d’infection invasive à streptocoque de groupe A (IISGA) est un phénomène partagé à l’échelle européenne(le Royaume-Uni, l’Irlande, les Pays-Bas, la Suède… rapportent également une augmentation du nombre de cas). Cette augmentation est particulièrement visible chez les enfants de moins de 10 ans.

Dans ce contexte, Santé publique France (SpF) dans le cadre de ses missions de surveillance et d’alerte collabore avec le GFRUP (Groupe Francophone de Réanimation et d’Urgences Pédiatriques) et son réseau de réanimateurs pédiatriques afin d’objectiver et de décrire plus précisément l’incidence des cas d’IISGA pédiatriques au niveau national ainsi que leur sévérité. Dans cet objectif un protocole d’investigation des cas d’IISGA communautaires pédiatriques sévères a été élaboré. Le questionnaire associé vise à documenter les cas survenant sur le territoire et à identifier leurs déterminants. Un premier bilan sera réalisé dans les prochaines semaines.

NB : la documentation des cas ne se substitue pas au circuit de signalement : tous les cas (pédiatriques et adultes) d’IISGA nécessitant une hospitalisation doivent faire l’objet d’un signalement dans les meilleurs délais à l’Agence régionale de santé, préalablement au remplissage du questionnaire, conformément aux messages DGS-Urgent n°2022-83 et MARS n°2022-35 du 6 décembre 2022, afin que les ARS puissent mettre en œuvre, dans les meilleurs délais, les mesures de santé publique dans l’entourage des cas[1].
 

Vous trouverez le protocole ainsi que le questionnaire d’investigation au lien suivant ainsi que sur le site de Santé publique France (https://www.santepubliquefrance.fr/docs/situation-des-infections-invasives-a-streptocoque-a-en-france.-point-au-8-decembre-2022).

Par ailleurs, vous trouverez ci-dessous des précisions sur la conduite à tenir au tour d’un cas d’infection invasive à streptocoque du groupe A :

–          Concernant la prise en charge de cas : il est rappelé qu’il est déconseillé d’utiliser des anti-inflammatoires non-stéroïdiens (AINS) dans le traitement des infections à SGA. Les résultats d’une enquête de pharmacovigilance réalisée par les centres régionaux de pharmacovigilance de Tours et Marseille, suggèrent en effet que ces infections, en particulier à Streptocoque, pourraient être aggravées par la prise de ces AINS ;

–          Concernant la prise en charge des contacts : 

o   Le Groupe de pathologie infectieuse pédiatrique de la Société française de pédiatrie (GPIP-SFP) et la Société de pathologie infectieuse de langue française (SPILF) recommandent le diagnostic (TROD) et le traitement précoce des infections à SGA dans l’entourage d’un cas d’infection invasive (repérage des patients symptomatiques, traitement privilégiant l’amoxicilline) (cf. avis Infections graves à Streptocoque A | gfrup.sfpediatrie.com) ;

o   Une antibioprophylaxie est recommandée pour les sujets contacts ayant des facteurs de risque de formes invasives (âge supérieur à 65 ans ; varicelle évolutive ; lésions cutanées étendues, dont les brûlures ; toxicomanie intra-veineuse ; pathologie évolutive (diabète, cancer, hémopathie, infection par le VIH, insuffisance cardiaque) ; prise importante de corticoïdes par voie orale). A cette liste, le GPIP-SFP et la SPILF recommandent d’ajouter les nouveau-nés de mères ayant une infection invasive.

     §  Si une antibioprophylaxie est prescrite à un sujet contact vivant sous le même toit que le cas, elle doit également être prescrite à l’ensemble des sujets contacts du foyer ;

     §  Le traitement prophylactique des contacts étroits doit être administré le plus tôt possible, de préférence dans les 24 heures suivant l’identification du cas, mais est toujours recommandé jusqu’à 7 jours après le dernier contact avec le cas ;

     §  Enfin, dans le contexte actuel de tensions en antibiotiques, le GPIP-SFP et la SPILF recommandent pour les personnes contacts de privilégier Céphalosporines orales (cefalexine, cefuroxime-axetil, voire cefpodoxime ou cefixime) ou les macrolides (clarithromycine, voire azithromycine).

La survenue de 2 cas d’infection invasive à SGA ou plus issus d’une même collectivité dans un délai de moins de 1 mois doit faire l’objet en lien avec l’ARS d’une discussion sur l’indication d’une antibioprophylaxie des personnes contacts (au-delà des personnes contacts avec facteur de risque).

Nous vous remercions pour votre mobilisation et nous vous tiendrons informés de toute évolution de la situation ou des recommandations.

Dr Grégory EMERY

Directeur Général adjoint de la Santé
Signé   

[1] Conformément à l’avis du 18/11/2005 du Conseil supérieur d’hygiène publique de France relatif à la conduite à tenir autour d’un ou de plusieurs cas, d’origine communautaire, d’infections invasives à Streptococcus pyogenes (ou streptocoques du groupe A)


Les messages “dgs-urgent” sont émis depuis une boîte à lettres DGS-URGENT@diffusion.dgs-urgent.sante.gouv.fr ou dgs-urgent@dgs.mssante.fr​.
Pour vérifier qu’ils ont bien été émis par une personne autorisée du ministère de la santé, consultez la liste des messages disponible sur le site Internet du ministère.Source : DGS / Mission de l’information et de la communication / Sous-direction Veille et sécurité sanitaire (VSS)
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