Article de l’excellente revue « Le Pharmacien de France »: Prioriser ou pas ?

La pénurie de vaccins contre la grippe conjuguée à la deuxième vague d’épidémie de Covid-19 accélère les mesures. Le ministère de la Santé a émis des recommandations afin d’encourager une stratégie de priorisation envers la population cible

Le mi­nis­tère de la Santé de­mande « de ré­ser­ver la vac­ci­na­tion, l’édi­tion des bons de prise en charge et les pres­crip­tions mé­di­cales de vac­cins contre la grippe aux seules per­sonnes cibles pour la pé­riode cou­rant du mardi 13 oc­tobre à la fin du mois de no­vembre ». Du­rant cet in­ter­valle, la dis­pen­sa­tion des doses de vac­cins par les phar­ma­cies sera « ré­ser­vée aux per­sonnes qui pré­sen­te­ront le bon de prise en charge adressé par l’As­su­rance ma­la­die ou édité par les pro­fes­sion­nels de santé, ainsi qu’aux per­sonnes pré­sen­tant une pres­crip­tion mé­di­cale et aux pro­fes­sion­nels de santé pré­sen­tant leur carte pro­fes­sion­nelle ».

« La pa­ru­tion au Bul­le­tin of­fi­ciel de ces re­com­man­da­tions, pré­cé­dem­ment éta­blies et com­mu­ni­quées par la Haute Au­to­rité de santé, leur confère au­jour­d’hui une force d’au­tant plus contrai­gnante qu’elles s’ins­crivent dans un contexte de pé­nu­rie », in­dique Maître Fa­brice Di Vi­zio, avo­cat spé­cia­liste en droit de la santé. Ces re­com­man­da­tions obligent le phar­ma­cien à faire des choix en sé­lec­tion­nant la dis­pen­sa­tion vers les pa­tients les plus fra­giles. « Dé­li­vrer le vac­cin an­ti­grip­pal sans prio­ri­ser se­rait plus ris­qué que d’op­po­ser un re­fus à une per­sonne hors cible. Le phar­ma­cien n’a au­cun in­té­rêt à s’écar­ter des re­com­man­da­tions. Au­cun juge ne pour­rait le pour­suivre pour avoir scru­pu­leu­se­ment res­pecté le com­man­de­ment de l’au­to­rité lé­gi­time en ma­tière de santé pu­blique », pour­suit Maître Fa­brice  Di Vi­zio.

Pri­vi­lé­gier l’in­té­rêt gé­né­ral

À l’in­verse, si le phar­ma­cien dé­livre sans prio­ri­ser, on pour­rait lui re­pro­cher une en­trave à sa mis­sion de santé pu­blique qui consiste à veiller à ce que les per­sonnes vul­né­rables ne su­bissent pas les consé­quences d’une pé­nu­rie de vac­cin. Se­lon l’ar­ticle R.4235-8 du Code de la santé pu­blique « les phar­ma­ciens sont te­nus de prê­ter leur concours aux ac­tions en­tre­prises par les au­to­ri­tés com­pé­tentes en vue de la pro­tec­tion de la santé ». Et même si l’ar­ticle R.4235-6 du même code in­dique que « le phar­ma­cien doit faire preuve du même dé­voue­ment en­vers toutes les per­sonnes qui ont re­cours à son art », le contexte sans pré­cé­dent im­pose d’agir en pri­vi­lé­giant l’in­té­rêt gé­né­ral.

« Face à la pé­nu­rie cer­taine de vac­cins qui s’an­nonce, les phar­ma­ciens se­ront une nou­velle fois en pre­mière ligne face à la co­lère des pa­tients », dé­plore la FSPF qui a de nou­veau de­mandé au mi­nis­tère de la Santé « de prendre ses res­pon­sa­bi­li­tés et d’in­for­mer la po­pu­la­tion hors cible et les pro­fes­sion­nels de santé pres­crip­teurs qu’il n’y aura pas de vac­ci­na­tion an­ti­grip­pale cette an­née en de­hors des per­sonnes fra­giles ».

Par Fabienne Rizos-Vignal

23 Octobre 2020

source Le Pharmacien de France

Les Pharmaciens du Sud

GRATUIT
VOIR