D’Aigremoine en Staphisaigre : travaux d’hiver ; mi-Janvier 2004

Des côtes de veau poêlées aux cèpes, au déjeuner, accompagnées de fleurettes de chou-fleur sautées… et une belle après-midi devant nous, le soleil darde ses mille flèches… on renoue avec des activités oubliées dans les brumes de l’année précédente ; du fumier épandu un peu tardivement, quelques pots ou vasques remués et nettoyés pour des pensées à venir… comme J. me rejoint dans la pinède, elle découvre de son œil perçant trois nids de chenilles – fantômes blanchis emmaillotés aux branches – à la cime des pins de l’arrivée… alerte rouge ! Ni une ni deux,  je suis à l’extrême bout de l’échelle, défiant la pesanteur et l’équilibre ; chutent bientôt les cônes gluants, contaminateurs infâmes. Une petite promenade s’ensuit pour dégourdir mes jambes tremblantes.

A l’occasion d’une recherche dans le dico, je tombe par hasard sur l’aigremoine et l’azerole, dont les noms m’interpellent…

Aigremoine. n.f ; du latin agrimonia, altération du grec argemoné « pavot », avec influence de aigre. Plante astringente, de la famille des Rosacées, tribu des Sanguisorbées.

AIgremoine

« Les fruits sont des akènes qui restent inclus dans la coupe dont les parois restent sèches. » La tribu comprend, entre autres les Pimprenelles.

« On corrobore les entrailles avec les trochisques d’aigremoine »,  (A.Paré)

Une espèce est appelée aigremoine eupatoire…

« Aigremoine est appelée eupatorium, d’Eupator roi, qui le premier, la mit en réputation », (O. de Serres)

Azerole. n.f ; de l’espagnol acerola, emprunt à l’arabe az-zou’-roûr ; c’est le fruit de l’azerolier, une variété d’aubépine dite épine d’Espagne ; sa cousine l’aubépine (alba «  blanche », spina « épine ») et lui sont tous deux des Rosacées, du genre Cratægus et l’azerolier est plus connu sous le nom de Buisson ardent : c’est le pyracantha

« Une blanche aubépine, une fleur, comme lui

Dans le grand ravage oubliée »,  (Victor Hugo).

Le mot aigremoine sinue pendant la nuit dans mes réseaux limbiques et mon subconscient au travail me fait cadeau au réveil d’une pêche qui, sans être miraculeuse, me fait passer un agréable moment botanique encore… l’heureuse élue de mes synapses est la staphisaigre – dont l’aigre n’a rien de commun avec celui de l’aigremoine  ( et ni l’un ni l’autre de rapport étymologique avec une quelconque âcreté ou acidité). La plante revient de mes circonvolutions comme si souvent avec son nom latin attaché : Delphinium staphisagria .L. Le genre Delphinium (ou Dauphinelle) appartient à la famille des Renonculacées et la staphisaigre est une cousine proche du glorieux aconit.

Staphisaigre. n.f (1556 ; stafizégre XIII°) du latin Staphis agria, mots grecs, proprement « raisin sauvage ». Le Y a sauté de manière apparemment anormale ; en réalité, le latin ayant « romanisé » les deux mots grecs – Staphus devenant Staphis -, l’ensemble a été récupéré tel quel en ancien français ; à la différence des mots savants créés au XVIII° – comme « staphylin », «  qui appartient à la luette » (à cause de sa forme en grappe de raisin) – où l’on a transposé le « u » grec en Y. Cette variété de dauphinelle a des graines toxiques ; connue et utilisée dans l’Antiquité et le moyen-âge elle est reléguée en médecine populaire.

La poudre obtenue en pulvérisant les graines a des propriétés parasiticides, d’où son nom populaire d’herbe aux poux et d’herbe aux pouilleux ; elle entre dans la composition de la poudre de capucin avec la cévadille (une Liliacée voisine du colchique), le persil et le tabac. L’alcaloïde contenu dans les graines est la delphinine utilisée, avec beaucoup d’accidents – elle a quelques effets secondaires charmants, peut donner des convulsions, des paralysies, de la diarrhée, des vomissements, jusqu’à conduire à l’asphyxie et à l’arrêt du cœur en diastole – comme succédané de l’aconitine.

La plante a un cousin bien moins violent et ombrageux, le Delphinium ajacis ou pied d’alouette qu’on cultive dans les jardins ; avec ses fleurs violettes aux pétales pointus et leur éperon droit ou incurvé vers le haut, elle ressemble beaucoup à l’ancolie.

« Herbe aux pouilleux, en latin, staphisagria, veut estre en bonne terre cultivée et arrousée, non trop soleillée »,  (O. de Serres)

 Cet extrait est tiré du livre Sentiers Botaniques de Michel Bernardot :

 cliquez ici:                  sentiers botaniques de Michel Bernardot

 

 

La minute de culture: Le préservatif dans tous ses états.

 Si le problème de la contraception est généralement dévolu aux femmes, les hommes s’en sont aussi  souciés. Les premières traces de condom remonte à l’Egypte ancienne. On a retrouvé, sur des peintures  murales, un genre de préservatif primitif sous forme de sachet de lin.

 

L’objet était aussi connu des  Chinois et des Japonais, qui le fabriquaient en cuir ou en écailles de tortue.
Les Romains et les Grecs, eux, ont développé des modèles réutilisables plusieurs fois, à partir d’intestins  ou de vessies d’animaux. Pour freiner la fertilité, ils portaient également des amulettes faites d’une dent  d’enfant, d’une bille de marbre, d’un morceau de foie de chat ou d’une matrice de lionne.

 

Le préservatif va connaître des hauts et des bas en fonction du contexte. Les épidémies de maladies  vénériennes, comme celle de la syphilis au XVIe siècle, ont beaucoup contribué à son expansion.
En périodes de guerre, il était vivement recommandé aux soldats qui allaient se divertir avec des  prostituées. Ainsi, dans l’Allemagne nazie, le préservatif était interdit au sein de la famille – il s’agissait  de mettre au monde le plus grand nombre possible d’enfants de «race supérieure» –, mais chaudement  recommandés aux soldats, afin d’éviter la propagation des MST  qui auraient pu décimer les troupes.

 

En 1844, Goodyear® développe le caoutchouc vulcanisé, dont on ne fera pas que des pneus. Les entrailles animales sont abandonnées au profit de ce matériau plus hygiénique et plus sûr.

 

 

La production de masse commence.
Elle connaît son apogée avec l’apparition du sida, au milieu des années 80. Comme à chaque épidémie, la sécurité et la prévention prennent le pas sur la contraception. Aujourd’hui encore, c’est le seul moyen de contraception qui protège des MST.

Un pharmacien qui découvre: BALARD ANTOINE JÉRÔME(1802-1876)

Antoine-Jérôme BALARD

Chimiste français né le 30 septembre 1802 à Montpellier et mort le 30 avril 1876 à Paris. Issu d’une modeste famille de vignerons, Balard fait ses études supérieures à l’université de sa ville natale. Il y suit les enseignements de pharmacie – il obtient son doctorat en 1826 – et parallèlement ceux de physique et de chimie. Durant ses études, il devient préparateur du titulaire de la chaire de chimie, avant d’obtenir ce poste en 1834. Il est ensuite nommé professeur de chimie à la Sorbonne à Paris, puis professeur au Collège de France en 1851. En 1844, Balard avait été élu membre de l’Académie des sciences.

C’est son intérêt pour la chimie des composés marins qui va le conduire à la grande réalisation de sa vie, la découverte du brome. Il s’intéresse très tôt à l’iode – élément découvert en 1811 par Bernard Courtois (1777-1838) – et il en étudie, à l’aide d’une méthode efficace qu’il a mise au point, la présence et la proportion dans des plantes marines de la mer Méditerranée et de l’océan Atlantique. Au cours de ces recherches, il isole en 1825, dans les eaux des salines, près de Montpellier, un composé liquide rouge sombre à l’odeur désagréable (brome vient du grec brômos, puanteur) ; il montre vite que ce composé constitue un nouvel élément chimique, analogue au chlore et à l’iode, déjà connus. L’annonce, le 3 juillet 1826 à l’Académie des sciences, de la découverte du jeune pharmacien fait sensation. En fait, la découverte de ce nouvel élément fut particulièrement importante et appréciée par la communauté chimique d’alors parce qu’elle mettait en évidence l’existence d’une « famille » de composés –  les «halogènes », comme allait les nommer dès 1826 Jöns Jacob Berzelius (1779-1848) –, ayant des propriétés physiques très différentes, mais un ensemble de propriétés chimiques similaires.

En fait, le nouveau composé avait déja été isolé, mais les chimistes n’avaient pas compris la nature élémentaire du liquide rouge qu’ils avaient obtenu. Ainsi, Justus Liebig (1803-1873) lui avait attribué la structure d’un chlorure d’iode et n’avait pas poursuivi son étude.

Balard va effectuer une étude approfondie des propriétés du brome et de certains de ses composés. Il étudie également la nature des propriétés décolorantes du chlore – l’« eau de Javel » –, ce qui le conduit à la découverte de l’acide hypochloreux et du monoxyde de chlore.

Certains chimistes de l’époque, à l’esprit frondeur, ironisaient sur les résultats jugés peu nombreux que Balard avait obtenus après l’isolement du brome en prétendant que « Balard avait été inventé par le brome »….

source Universalis

NDLR: C’est injuste de se moquer de notre confrère car, en 1844, il a aussi synthétisé le nitrite d’amyl, bon d’accord, c’est 20 ans plus tard que ce composé a été utilisé pour en lever les spasmes coronariens. Et 130 ans plus tard, les milieux homosexuels trouvèrent une utilisation plus ludique mais autrement plus dangereuses en inventant les fameux « poppers ».

P.L

Début du XVème siecle: Substitution à tout va grâce aux « quiproquo ».

En 1404, les statuts de Pamiers (une sorte de code de bonnes pratiques) prévoyaient minimum de drogues dans chaque boutique : « que le médecin de Pamiers dise et recommande aux-dits apothicaires qu’ils aient dans leur boutique, électuaires, opiats et autres médicaments que, sous serment, ledit médecin de Pamiers aura jugé utiles et nécessaires à l’honneur, au service, à l’utilité de cette vénérable cité et que lesdits apothicaires, sous peine de soixante sous, les tiennent prêts à livrer…. ».

Les apothicaires ne possèdent pas toujours les produits prescrits par les médecins et doivent les remplacer par d’autres qui figurent dans des listes officielles : les « quiproquo » (du latin scolastique : «quid pro quod« : ceci à la place de cela). Ainsi l’eau de pluie peut être remplacée par l’eau de fontaine, le miel par le sucre, la coloquinte par le ricin.

En 1484, une ordonnance de Charles VIII sépare les métiers d’apothicaires et d’épiciers. Tout apothicaire peut être aussi épicier mais l’épicier ne peut être apothicaire qu’après avoir servi quatre ans comme apprenti, passé un examen et fait un chef d’œuvre.

Les boutiques des apothicaires signalées par des inscriptions : speciari, piperari, pigmentari, aromatari, sont largement ouvertes sur la rue dans un endroit clair, aéré et fréquenté par la population, près d’un marché, d’une église.

P.L

Quinquina

Quinquina (Cinchona officinalis )

Le Quinquina ou Kina-kina (écorce des écorces) est importé en Europe sous le nom d’écorce du Pérou.

C’est dans ce pays que les Indiens avaient découvert ses propriétés antimalariques.

Cette écorce doit sa dénomination latine à la femme du vice-roi du Pérou, la Comtesse d’El Chinchon qui aurait dû sa guérison à l’emploi de cette écorce.

Reconnaissante, elle facilita l’introduction de cette drogue en Espagne où elle porta le nom de « Poudre de la Comtesse ». Puis, commercialisée par les Jésuites, elle devint « Poudre des Jésuites ».

Pour lutter contre le paludisme qui sévit un peu partout et n’épargne pas la région de Versailles, Louis XIV la fait importer en France.

Le Roi, lui-même atteint par les fièvres, reçoit cette poudre sous forme d’un remède secret, de Talbot, un garçon apothicaire de Cambridge et guérit.

En remerciement, le Roi octroie à Talbot une pension contre la divulgation de la formule de son remède secret. L’action thérapeutique du Quinquina est reconnue bien que la médecine officielle représentée par la Faculté de Médecine de Paris et son Doyen Guy Patin en proscrive l’emploi.

Les Pharmaciens du Sud

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