Quand le prélèvement à la source deviendra-t-il obligatoire ?
Comme indiqué par le Premier ministre le 4 septembre, le prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu des salariés s’appliquera obligatoirement aux revenus versés à compter du 1er janvier 2019.
Quel sera votre rôle ?
En qualité de collecteur de l’impôt sur le revenu, les pharmacies d’officine devront, chaque mois et pour chaque salarié, respecter les étapes suivantes :
- appliquer au salaire net imposable le taux d’imposition communiqué par l’administration fiscale ;
- retrancher le montant de l’impôt sur le revenu ainsi calculé, du salaire net à verser ;
- déclarer le montant de l’impôt sur le revenu retenu à la source ;
- reverser à l’administration fiscale le montant de l’impôt sur le revenu.
En pratique, qui opère le prélèvement à la source ?
La déclaration du montant de l’impôt ainsi que le reversement de l’impôt par vos soins se font exclusivement via la déclaration sociale nominative (DSN).
En pratique, c’est donc votre cabinet comptable qui réalisera ces opérations, comme c’est déjà le cas pour le paiement des cotisations sociales.
Pour les officines adhérentes au service du Titre emploi service entreprise (TESE), le prélèvement à la source s’effectuera au moyen du dispositif du TESE.
Comment connaître le taux d’imposition à appliquer ?
Le taux d’imposition applicable à chaque salarié est communiqué directement à l’employeur (ou son comptable) par l’administration fiscale via le circuit retour de la déclaration sociale nominative (DSN). L’employeur est tenu au secret professionnelconcernant le taux d’imposition de ses salariés.
En cas de réclamation ou demande de modification de son taux d’imposition, le salarié doit s’adresser à l’administration fiscale. L’employeur n’est pas compétent pour opérer des modifications du taux d’imposition sur demande du salarié.
Lorsque le salarié opte pour le taux non personnalisé (= taux neutre), l’administration fiscale ne communique aucun taux d’imposition à l’employeur. Ce dernier a alors l’obligation d’appliquer au salarié concerné le taux, défini par la loi de finances[1], qui ne tient pas compte de sa situation de famille (marié, pacsé, avec enfant…) ni des autres revenus qu’il perçoit en contrepartie de son travail. Dans une telle hypothèse, il revient ensuite au salarié, chaque mois, de régulariser lui-même sa situation auprès de l’administration fiscale pour payer son reliquat éventuel d’impôt sur le revenu ou percevoir le remboursement d’un trop-versé.
Précisons que le taux non personnalisé sera également appliqué si l’administration fiscale n’est pas en mesure de communiquer un taux à l’employeur, par exemple en cas de nouvelle embauche ou de début d’activité professionnelle d’un salarié.
Quelle sera votre responsabilité ?
De la même façon que vous êtes responsable du paiement des cotisations sociales à l’URSSAF, vous serez responsable vis-à-vis de l’administration fiscale en cas d’erreur ou d’absence de reversement de l’impôt sur le revenu de vos salariés.
Des sanctions peuvent être prises à votre encontre :
- en cas d’erreur dans le montant de l’impôt (erreur portant sur l’assiette de l’impôt ou bien sur le taux d’imposition) : amende administrative de 5 % du montant non versé avec un minimum de 250 euros ;
- en cas de défaut de dépôt de la DSN : amende administrative de 10 % de l’impôt non déclaré avec un minimum de 250 euros ;
- en cas de défaut de dépôt de la DSN et de règlement de l’impôt : amende administrative de 80 % de l’impôt non payé et, en cas de condamnation pénale, amende de 9 000 euros et emprisonnement de cinq ans si le retard excède un mois
Toutefois, sur intervention de l’U2P, organisation patronale représentative dans le champ interprofessionnel, le ministre de l’Action et des Comptes publics a annoncé que pour les petites entreprises, aucune pénalité ne serait appliquée en 2019 (sauf fraude manifeste) et qu’à compter de 2020, le minimum de l’amende administrative serait réduit à 50 euros[2].
Quand et comment reverser l’impôt à l’Etat ?
Comme pour le paiement des cotisations sociales, le reversement de l’impôt sur le revenu à l’administration fiscale s’effectuera par prélèvement, au moyen de la DSN.
Préalablement, le pharmacien titulaire doit déclarer dans son espace personnel sur « impots.gouv.fr » les références du compte bancaire qui fera l’objet des prélèvements, puis adresser à son établissement bancaire un mandat SEPA autorisant l’administration fiscale à opérer ces prélèvements (pour en savoir plus, cliquez sur le lien suivant : procédure pour mandat SEPA et autorisation télé règlement).
La fréquence de reversement pourra être différente en fonction de l’effectif de l’officine :
- le 8 du mois pour les officines de moins de 50 salariés ayant une date limite de dépôt de la DSN au 5 du mois ;
- au plus tard le 15 du premier mois du trimestre suivant celui au cours duquel ont eu lieu les retenues, pour les entreprises de moins de 11 salariés qui ont opté pour le versement trimestriel des cotisations sociales. Cette option ne concerne que la fréquence du paiement, la déclaration des cotisations sociales et du montant de l’impôt sur le revenu retenu à la source devant être réalisées mensuellement dans tous les cas. Ces entreprises peuvent également choisir de reverser mensuellement l’impôt sur le revenu de leurs salariés.
Quelles incidences sur la présentation du bulletin de salaire ?
Le bulletin de salaire devra obligatoirement comporter les mentions suivantes :
- l’assiette du prélèvement à la source, autrement dit le revenu net imposable ;
- le taux d’imposition appliqué ;
- le montant de l’impôt sur le revenu prélevé ;
- le montant du salaire net qu’aurait perçu le salarié en l’absence de prélèvement à la source ;
- le montant du salaire net effectivement versé au salarié, déduction faite du prélèvement à la source.
Focus sur quelques cas particuliers
- Quel taux d’imposition utiliser pour une nouvelle embauche ?
Lors de l’arrivée d’un nouveau salarié dans les effectifs, l’employeur ne connaît pas son taux d’imposition dans la mesure où aucune donnée n’a été échangée à son sujet avec l’administration fiscale via la DSN.
L’employeur devra tout de même procéder au prélèvement à la source en utilisant le taux non personnalisé (taux neutre). Précisons qu’une fois que l’employeur aura été informé du taux personnalisé du salarié par l’administration fiscale, aucune régularisation du prélèvement à la source réalisé au moyen du taux neutre ne sera nécessaire.
A compter de décembre 2018, un service permettra aux entreprises de demander à l’administration fiscale la communication du taux d’imposition du salarié en dehors du rythme mensuel des déclarations DSN, c’est-à-dire notamment, avant le versement du premier salaire. Ce service intitulé « TOPaze » sera accessible sur Net-Entreprises.
- En cas d’arrêt de travail d’un salarié ?
Il revient à l’organisme qui verse les revenus de remplacement au salarié de procéder au prélèvement du montant de l’impôt sur le revenu.
Ainsi, lorsque la sécurité sociale verse les indemnités journalières directement au salarié, elle reversera à l’administration fiscale le montant de l’impôt sur le revenu, directement prélevé sur les indemnités servies.
En revanche, lorsque les indemnités journalières de la sécurité sociale vous sont versées par subrogation, il vous appartient de prélever le montant de l’impôt sur le revenu et de le reverser à l’Etat. Toutefois, seules les indemnités journalières versées au cours des deux premiers mois de l’arrêt de travail sont soumises au prélèvement à la source : au-delà des deux premiers mois, les indemnités journalières de la sécurité sociale subrogées ne font plus l’objet du prélèvement à la source.
Hormis le cas où le contrat de travail est rompu, les indemnités complémentaires versées par le régime de prévoyance sont, quant à elles, toujours versées à l’employeur. C’est donc ce dernier qui doit opérer le prélèvement à la source et reverser le montant de l’impôt à l’administration fiscale.
ATTENTION : les indemnités complémentaires de prévoyance sont soumises au prélèvement à la source pendant la totalité de l’arrêt de travail, et pas seulement pendant les deux premiers mois de l’arrêt de travail.
Pour en savoir plus sur ce sujet, nous vous invitons à cliquer sur le lien suivant : PAS et IJSS subrogées.
- Apprentis et stagiaires :
Dans le cas d’un contrat d’apprentissage ou de stage, la rémunération versée à un apprenti ou un stagiaire est exonérée d’impôt sur le revenu en deçà d’un seuil annuel correspondant au montant du SMIC annuel.
La limite d’exonération ne donne pas lieu à proratisation, ni pour les salaires versés aux apprentis, ni pour les gratifications versées aux stagiaires.
Ainsi, les sommes versées doivent donc être soumises au prélèvement à la source lorsque celles-ci sont imposables, c’est-à-dire lorsqu’elles dépassent le seuil d’exonération.
Si vous êtes en mesure de suivre le cumul des revenus versés à un individu dans le cadre du contrat d’apprentissage ou de stage, vous n’avez toutefois pas connaissance des autres revenus éventuellement versés pour la même année fiscale à votre apprenti ou stagiaire. Dès lors vous devez apprécier si votre apprenti ou votre stagiaire doit faire l’objet du prélèvement à la source au regard des seules sommes que vous lui versez, sans tenir compte des revenus que l’apprenti ou le stagiaire peut percevoir par ailleurs.
Pour en savoir plus sur ce sujet, nous vous invitons à cliquer sur le lien suivant : PAS pour apprentis et stagiaires.
Dans l’hypothèse d’un CDD de courte durée (remplacements, aides en officine…) pour lequel vous ne bénéficiez pas de l’information relative aux taux d’imposition à appliquer, l’application du taux neutre pourrait conduire, si le salarié n’a pas de revenus réguliers au cours de l’année, à un sur-prélèvement fiscal.
C’est pourquoi l’administration fiscale a prévu l’application d’un abattement pour les CDD dont la durée initiale (= hors renouvellement) n’excède pas deux mois et pour les CDD à terme imprécis dont la durée minimale n’excède pas deux mois.
Dans ces deux cas seulement, et à condition que vous n’ayez pas été informé par l’administration fiscale du taux d’imposition à appliquer, l’assiette du prélèvement à la source sera calculée sur la base du salaire net imposable diminué d’un abattement forfaitaire égal à la moitié du montant net imposable d’un SMIC mensuel[3]. Une fois l’assiette déterminée, vous calculerez le montant du prélèvement à la source en appliquant le taux neutre correspondant à cette assiette réduite.
Précisons que cet abattement n’est jamais proratisé, y compris pour les CDD d’une durée inférieure à un mois. Il peut donc conduire à la détermination d’une assiette nulle, et donc à l’absence de prélèvement à la source.
L’application de l’abattement cesse dès lors que l’administration fiscale communique à l’employeur le taux d’imposition propre au salarié.
Pour en savoir plus sur ce sujet, nous vous invitons à cliquer sur le lien suivant : PAS et CDD moins de deux mois.
Et si j’ai d’autres questions ?
Vous trouverez, ci-joint, deux brochures éditées par le ministère de l’action et des comptes publics à destination des employeurs.
Si vous souhaitez en savoir plus, nous vous invitons à consulter les sites internet suivants :
Pour vous :
- informations générales à destination des entreprises :
https://www.economie.gouv.fr/prelevement-a-la-source/collecteur-entreprise
- foire aux questions à destination des entreprises :
https://www.economie.gouv.fr/prelevement-a-la-source/faq-collecteur
Pour vous et votre cabinet comptable :
- foire aux questions sur les aspects opérationnels du prélèvement à la source (mandats SEPA pour permettre les prélèvements par l’administration fiscale, cas de salariés en CDD de courte durée, trop-versé de salaire, erreur dans la DSN…) :
Base de connaissances DSN prélèvement à la source.
[1] Les logiciels de paie comprendront l’information du barème des taux non personnalisés.
[2] Source : communiqué de presse U2P n° 18.09.26 du 21 septembre 2018.